Gustave FLAUBERT (1821-1880). Manuscrit autographe, Sophonisbe – Mairet Corneille Voltaire ; 1 feuillet de titre et 28 pages in-fol. plus un f. blanc, le tout monté sur onglets, sous reliure bradel demi-maroquin à coins prune, titre en long doré sur le dos (Semet & Plumelle). Précieux recueil de notes sur la Sophonisbe de Corneille, puis la version que Voltaire donna de la tragédie de Mairet ; Flaubert s’inspira de la Carthaginoise Sophonisbe pour sa Salammbô (1862).. On connaît le formidable labeur de documentation historique et archéologique auquel s’attela Flaubert pour écrire son roman sur Carthage. C’est ici le dossier d’une des sources littéraires de Salammbô, qui permet aussi d’apprécier avec quel soin Flaubert lisait les grands auteurs, la plume à la main. L’héroïne des Sophonisbe est la fille d’un général carthaginois, épouse de Syphax, roi de Numidie, puis de son rival, Massinissa, autre roi ; elle s’empoisonne plutôt que de tomber aux mains des Romains, leurs ennemis. La plus grande partie du manuscrit (près des deux tiers) est consacrée aux cinq actes de la pièce de Corneille (1663), lue dans une édition accompagnée des commentaires de Voltaire. Le manuscrit, à l’encre brune, remplit le recto et le verso de 14 feuillets ; il présente quelques ratures.. « Préface de Voltaire. V. trouve que le sujet par lui-même est fort difficile à traiter, presque impraticable, parce que “Massinissa obligé de voir sa femme menée en triomphe à Rome ou de la faire périr pour la soustraire à cette infamie ne peut guère jouer qu’un rôle désagréable. Un vieux triumvir tel qu’Antoine qui se perd pour une femme telle que Cléopâtre est encore moins intéressant parce qu’il est plus méprisable”. Il parle ensuite de la pièce de Mairet qu’il trouve sans intérêt. […] Il trouve que “la Sophonisbe de Mairet avait un mérite très nouveau en France, c’était d’être dans les règles des théâtres, les trois unités de lieu de temps et d’action y sont parfaitement observées”. “…Mais surtout ce qui soutient si longtemps la pièce de Mairet c’est qu’il y a de la vraie passion”. Comment concilier cela avec le manque d’intérêt dont V. se plaint plus haut ».. « Préface de Corneille. – Difficulté de traiter un sujet déjà traité par un autre. Corneille s’est attaché à faire différemment, mais non pas mieux que Mairet. Il cite plusieurs auteurs qui comme lui ont traité des mêmes sujets. Déjà Soph. avait été mis sur la scène par Trissin en Italie et Mont-Chretien en France. Il s’est attaché surtout à la fidélité historique des caractères tels qu’ils sont représentés par Tite-Live. Corneille n’était pas de l’école de l’embellissement, de l’annoblissement. Il voulait donc que tout l’effet ressortît de la vérité de la chose devenue idéale à force d’être exacte »… Flaubert cite longuement les réflexions de Corneille, puis commence une analyse détaillée de la pièce, scène par scène, accumulant des résumés d’action, extraits de vers et observations critiques, rappelant d’abord : « La scène est à Cyrthe capitale du royaume de Siphax dans le palais du roi ». Ainsi, à la fin de I, 1 : « V. trouve cette exposition bonne. La mienne me paraît préférable »… Les premiers vers cités, dès la première scène, peuvent annoncer les batailles des mercenaires contre Carthage dans Salammbô :. « Ses troupes se montrant autour du soleil. Ont de notre ruine arrêté l’appareil.. À peine une heure ou deux elles ont pris haleine. Qu’il les range en bataille au milieu de la plaine.. L’ennemi fait le même et l’on voit des deux parts. Nos sillons hérissés de piques et de dards »…. Après l’expression d’amour d’Eryxe (II, 1), dans laquelle il admire des vers « exquis comme détail », il note : « Là-dessus V. dit : on sent dans cette scène combien Eryxe est froide et rebutante »… La magnifique scène entre Sophonisbe et Syphax, dans laquelle la reine refuse de se rendre aux Romains, quitte à sacrifier son mariage et à s’allier à Massinisse (III, 6), paraît tout aussi mal comprise de Voltaire : « Voltai
Gustave FLAUBERT (1821-1880). Manuscrit autographe, Sophonisbe – Mairet Corneille Voltaire ; 1 feuillet de titre et 28 pages in-fol. plus un f. blanc, le tout monté sur onglets, sous reliure bradel demi-maroquin à coins prune, titre en long doré sur le dos (Semet & Plumelle). Précieux recueil de notes sur la Sophonisbe de Corneille, puis la version que Voltaire donna de la tragédie de Mairet ; Flaubert s’inspira de la Carthaginoise Sophonisbe pour sa Salammbô (1862).. On connaît le formidable labeur de documentation historique et archéologique auquel s’attela Flaubert pour écrire son roman sur Carthage. C’est ici le dossier d’une des sources littéraires de Salammbô, qui permet aussi d’apprécier avec quel soin Flaubert lisait les grands auteurs, la plume à la main. L’héroïne des Sophonisbe est la fille d’un général carthaginois, épouse de Syphax, roi de Numidie, puis de son rival, Massinissa, autre roi ; elle s’empoisonne plutôt que de tomber aux mains des Romains, leurs ennemis. La plus grande partie du manuscrit (près des deux tiers) est consacrée aux cinq actes de la pièce de Corneille (1663), lue dans une édition accompagnée des commentaires de Voltaire. Le manuscrit, à l’encre brune, remplit le recto et le verso de 14 feuillets ; il présente quelques ratures.. « Préface de Voltaire. V. trouve que le sujet par lui-même est fort difficile à traiter, presque impraticable, parce que “Massinissa obligé de voir sa femme menée en triomphe à Rome ou de la faire périr pour la soustraire à cette infamie ne peut guère jouer qu’un rôle désagréable. Un vieux triumvir tel qu’Antoine qui se perd pour une femme telle que Cléopâtre est encore moins intéressant parce qu’il est plus méprisable”. Il parle ensuite de la pièce de Mairet qu’il trouve sans intérêt. […] Il trouve que “la Sophonisbe de Mairet avait un mérite très nouveau en France, c’était d’être dans les règles des théâtres, les trois unités de lieu de temps et d’action y sont parfaitement observées”. “…Mais surtout ce qui soutient si longtemps la pièce de Mairet c’est qu’il y a de la vraie passion”. Comment concilier cela avec le manque d’intérêt dont V. se plaint plus haut ».. « Préface de Corneille. – Difficulté de traiter un sujet déjà traité par un autre. Corneille s’est attaché à faire différemment, mais non pas mieux que Mairet. Il cite plusieurs auteurs qui comme lui ont traité des mêmes sujets. Déjà Soph. avait été mis sur la scène par Trissin en Italie et Mont-Chretien en France. Il s’est attaché surtout à la fidélité historique des caractères tels qu’ils sont représentés par Tite-Live. Corneille n’était pas de l’école de l’embellissement, de l’annoblissement. Il voulait donc que tout l’effet ressortît de la vérité de la chose devenue idéale à force d’être exacte »… Flaubert cite longuement les réflexions de Corneille, puis commence une analyse détaillée de la pièce, scène par scène, accumulant des résumés d’action, extraits de vers et observations critiques, rappelant d’abord : « La scène est à Cyrthe capitale du royaume de Siphax dans le palais du roi ». Ainsi, à la fin de I, 1 : « V. trouve cette exposition bonne. La mienne me paraît préférable »… Les premiers vers cités, dès la première scène, peuvent annoncer les batailles des mercenaires contre Carthage dans Salammbô :. « Ses troupes se montrant autour du soleil. Ont de notre ruine arrêté l’appareil.. À peine une heure ou deux elles ont pris haleine. Qu’il les range en bataille au milieu de la plaine.. L’ennemi fait le même et l’on voit des deux parts. Nos sillons hérissés de piques et de dards »…. Après l’expression d’amour d’Eryxe (II, 1), dans laquelle il admire des vers « exquis comme détail », il note : « Là-dessus V. dit : on sent dans cette scène combien Eryxe est froide et rebutante »… La magnifique scène entre Sophonisbe et Syphax, dans laquelle la reine refuse de se rendre aux Romains, quitte à sacrifier son mariage et à s’allier à Massinisse (III, 6), paraît tout aussi mal comprise de Voltaire : « Voltai
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